C'est l’ébullition ce mardi à l’école n°4 de la Place Bethléem. Les enfants de deuxième primaire participent dans la bonne humeur à « l’atelier du goût » animé par Alain Boschman, chef coq, sous les yeux de Marie Arena, ministre-présidente de la Communauté française chargée, de l’éducation. Les yeux bandés, ils découvrent de nouveaux goûts comme cette salade de tomate aux crevettes qui remporte un franc succès. Il faut au départ dépasser sa peur de l’inconnu. Diogo, un des écoliers, s’«amuse beaucoup avec ces jeux ». Il «aime bien manger plein de choses différentes» et pense à devenir cuisinier.
La Communauté française souhaite lutter contre l'obésité chez l'enfant depuis plusieurs années. Pour cela les ministres Marie Arena, Catherine Fonck et Claude Eerdekens ont lancé le programme de promotion des attitudes saines. En matière d’alimentation, « l’état des lieux des cantines » , réalisé en mars dernier, se concrétise par un programme pour les écoles axé sur quatre points : formation du personnel de cuisine ; éducation aux goûts et aux saveurs ; labellisation des écoles ; réalisation d’un guide pratique pour des cantines scolaires de qualité.
Il s’agit d’une possible réponse à l’«énorme problème de poids chez l’enfant », selon Annick Hebrant, infirmière SPSE (Service de Promotion de la Santé) dans l’école. Pour elle, il y a toute une rééducation à faire car « les enfants mangent mal, ils manquent d’énergie et ont des caries à cause des sucreries et autres barres chocolatées ».
Il y aura 240 « ateliers du goût » dans les écoles primaires de la Communauté française. Ceux-ci seront animés par 17 grands chefs (voir encadré). Ils ont répondu présent pour transmettre aux plus jeunes leur passion du goût et des saveurs. Marie Arena souligne l’importance de « sensibiliser les enfants car ils sont vite enfermés dans certains goûts alimentaires » . Elle ajoute que « le fait de titiller leurs papilles de façon ludique leur permet de s’ouvrir plus facilement ».
Les écoliers goûtent ainsi à divers ingrédients qu’ils essayent de reconnaître. Ils doivent répondre à un petit test-jeu qui les incite à utiliser le nez, la bouche mais aussi les mains. Ils sont unanimement ravis, une petite fille projette de « faire des crevettes à la tomate » à sa maman. L’impact immédiat auprès des écoliers semble certain, il reste à déterminer à terme si leurs habitudes alimentaires en dehors de l’école s’amélioreront.
Trois questions à Alain Boschman, chef coq animateur d'atelier du goût
Racontez-nous votre« atelier du goût » ?
J’essaye de faire découvrir aux enfants trois sens : le goût, l’odorat, et le toucher. On leur fait d’abord sentir des choses connues comme le café, la lavande, la vanille, le tabac, le cacao. Puis je leur fait toucher, les yeux bandés, différentes textures comme de la farine, du sucre, des raisins secs, du fromage râpé. Je leur fait goûter des fruits comme l’ananas, la mandarine, l’orange, la pomme. Enfin ils boivent de l’eau sucrée, salée, au citron ou au pamplemousse. Ils doivent à chaque fois essayer de deviner ce qu’ils goûtent, sentent ou touchent.
Pourquoi participez-vous à ce type d’action ?
Cela fait six ans que je fais ça. Je fais gratuitement un suivi dans les écoles et auprès des écoliers au fil des années. Je crois qu’il faut bouger par rapport à l’obésité, il faut la combattre en rendant du plaisir à la bouffe et pas en supprimant les fast-food. Faire des jeux avec les enfants me plaît, le côté ludique leur permet de s’ouvrir. Je tire une satisfaction énorme quand à la fin les marmots m’applaudissent et viennent m’embrasser. Ils ne trichent pas, ils mangent vos paroles et vous font confiance. Il faut de l’instinct, beaucoup de cœur pour travailler avec eux. Mais aujourd’hui où c’est mon jour de congé, c’est ma bulle d’oxygène.
Pensez-vous que ce programme puisse porter ces fruits dans la lutte contre l’obésité notamment ?
J’espère qu’on va pouvoir changer un petit quelque chose, pour le moment c’est sûr que ce sont des paillettes. J’aimerais pouvoir sensibiliser au moins dix pour cent des enfants avec l’atelier et je m’investis complètement là dedans. J’espère que le plaisir de l’alimentation va l’emporter mais même si on aimerait changer les choses je n’ai pas de baguette magique. Il faut aussi que tous les acteurs concernés s’impliquent : les parents mais aussi les hommes politiques.